Saint-Pol-Roux


Le Palais D'ithaque

L’éloquence des nuits clignote sur Ithaque.
Un chœur d’avènement palpite dans les bois.
Sur les cadences d’huile une carène craque
Puis le sable trahit des pas vus autrefois.

La Reine, sur l’ivoire et l’argent de son thrône,
Sculptée, enclose des douze agrafes d’or fin
De son peplos, rêvant, hèle comme une aumône
L’Absent au casque vif dont son vieux jeûne a faim.

Par la kithare emplis des torrents du kratère
Et le ventre doublé de ventres de brebis,
Les Prétendants, sur les toisons des mets, par terre,
Ont des rires baveux plein leur trogne rubis.

Dans leur haleine d’ail coassent des grenouilles
Et leur vie est aveugle aux Kèrs au doigt fatal
Tandis que le brasier hérisse entre les rouilles
Des armes des cloisons un réveil de métal.

Les Femmes-aux-bras-blancs, dans l’impouvoir du mâle,
S’entrecueillent leur rose aux lueurs de leurs yeux
Dans l’appartement clos où le paros très pâle
Jalonne le logos négligeable des Dieux.

Dehors, la main tendue au chambranle de frêne,
Un soleil de vengeance accroupi dans les nuits
De ses hideurs d’emprunt, le Rêve de la Reine
A l’air d’un tas de paille où pourrissent des fruits.
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