Cette Reine qui n’eût qu’un château pour retraite,
Prisonnière çà bas, et Princesse là haut,
Sentit un vent d’acier qui lui trancha la tête,
Changeant son Royal Trône au sanglant échafaud.
XLII.
Ce Roi qui pouvoit voir en ses États reluire
L’Astre du jour après qu’il se couchoit pour nous,
Qui avoit au delà de nos mers un Empire,
Se vit abandonner à la merci des poux.
XLIII.
Celui qui préféra son jardin de Salone,
A toutes les grandeurs de l’Empire Romain,
Savoit bien les ennuis qu’apporte la Couronne,
Et combien est pesant le Sceptre dans la main.
XLIV.
D’un insensible Cours à la mort l’homme tire,
Parlant, jouant, riant, la mort fait son effort :
Pour dormir il en fait sa fin comme un navire,
Qui ne laisse d’aller quand le Nocher s’endort.
XLV.
La mort tue en tout lieu, du bain Aristobule,
Au milieu de son camp l’Empereur Apostat,
Philippes près l’Autel, aux grottes Caligule,
Carloman à la chasse, et César au Sénat.
XLVI.
Tel le fauve en la mer qui se perd en un fleuve :
La mort cherche Alexandre, et s’enfuit de Néron,
Un Empereur mangeant des potirons la trouve,
Un autre la reçoit d’une Dame au giron.
XLVII.
Toute main lui est bonne : Éric meurt par sa mère,
Par sa femme Alboin, par les siens Ariston,
Bajazeth par son fils, Mustapha par son père,
Par son frère Conrard, par soi-même Caton.
XLVIII.
En diverses façons sa face s’apprivoise :
Henri le Noir s’en va par un morceau de pain,
Un Roi Goth eut pour tombe un tonneau de cervoise,
Talas mourut de soif, et Antonin de faim.
XLIX.
Elle peut sa fureur en toute chose épandre,
Elle arme pour tuer, l’air, l’eau, le feu, le vent :
Une poire occit Druse, une figue Terpandre,
Une mouche étouffa Adrian en buvant.
L.
Aussi tôt un grand Roi, qu’un Berger elle emporte,
Les hommes en mourant n’ont qu’une qualité,
L’entrée et le départ sont tous de même sorte,
La pompe et le séjour font l’inégalité.