Jean Aicard


Ballade des Cantadors

Les Cantadors, malgré l'indifférence
D'un peuple sourd, épris du vil métal,
S'en vont encor, par notre belle France,
Cette oasis du monde occidental,
Chantant l'amour et le pays natal.
Les voyez-vous unis en confrérie ?
Tous s'entr'aidant, l'âme plus aguerrie,
Du nord au-sud ils prennent leur essor ;
Et, pour l'honneur de la grande patrie,
Chaque province aura son Cantador.

Sous les lauriers en fleurs de la Provence,
Je vois passer Aubanel et Mitral ;
Et Jean Aicard, des bords de la Durance,
Charme Paris par son vers magistral,
Tantôt lyrique et tantôt pastoral.
Déjà Brizeux, sur sa harpe attendrie,
A célébré sa Bretagne chérie,
Où le blé noir se mêle aux genets d'or.
Chantons ensemble et relisons Marie ;
Chaque province aura son cantador.

Jules Breton, donne la préférence
A son Artois, Vicaire est sans rival
Quand, par la Bresse, il va plein d'espérance
Cueillir des vers frais éclos sur le val
Et s'enivrer de bon jus automnal.
Hélas ! Bien loin de l'Alsace meurtrie,
Les deux Léser ont l'âme endolorie,
Pour Theuriet, il rapporte un trésor
De sa Lorraine ; et Grandmougin s'écrie :
Chaque province aura son cantador !

ENVOI
Amis, l'Auvergne où la rouge scorie
Sur les sommets aux pampres se marie,
Cherche un poète et ne l'a pas encor,
Mais que la Muse à mon rêve sourie :
Chaque province atlas son cantador !
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