Ne crois pas, ô passant, à me voir, quand tu passes,
Les mains vides, assis à mon seuil où s’enlace,
Au-dessus de ma tête et de mes cheveux blancs,
A soi-même le lierre égal et permanent,
Que je ne sache plus que la terre éternelle,
De saisons en saisons toujours se renouvelle.
Je n’ignore pas plus ces choses qu’autrefois
Quand, pour louer les dieux qui revivaient en moi,
Ou pour en couronner les nymphes des fontaines,
Toutes les fleurs tentaient mes deux mains incertaines.
Mais aujourd’hui, plus sage et de mon seuil, j’attends
Que l’été moins hâtif succède au court printemps,
Et, lorsque vient l’automne, aux dernières écloses,
Je choisis longuement ma rose entre les roses,
Car peut-être il faudra que cette fleur cueillie
Parfume jusqu’au soir le reste de ma vie.