Hégésippe Moreau


Chanson patriotique des danseuses de l’opéra -

De politique et cœtera
S’occupant après boire,
Les dames du grand Opéra
Hier chantaient : Victoire !
À s’émanciper aussi
Les Amours ont réussi :
Aux marchands de lorgnettes
Juillet du moins à profité.
Vivent les pirouettes !
Vive la liberté !

Devant les galbes et des nus,
Tartufe, qui s’indigne,
Dans nos jardins coiffait Vénus
D’une feuille de vigne :
Il eût, sans des jours meilleurs
……………………………………
Aux marchands de lorgnettes
Juillet du moins à profité.
Vivent les pirouettes !
Vive la liberté !

Consolez-vous, gens maladroits,
D’être vainqueurs et dupes :
Si là-bas on rogne vos droits,
On rogne ici nos jupes.
Votre étendard, vieux haillon,
Vaut-il un frais cotillon ?
Aux marchands de lorgnettes
Juillet du moins à profité.
Vivent les pirouettes !
Vive la liberté !

Contre nous, sans nous effrayer
Caton crie au scandale,
Et la Chambre veut nous rayer
De son budget vandale.
Que de pantins il paîra
Même ailleurs qu’à l’Opéra !
Aux marchands de lorgnettes
Juillet du moins à profité.
Vivent les pirouettes !
Vive la liberté !

Au duc, soucieux et rêvant,
La sylphide coquette,
Flic flac, dit en jetant au vent
Les plis de sa jaquette :
Vous qui pleurez Charles dix,
Riez donc : voilà des lis !
Aux marchands de lorgnettes
Juillet du moins à profité.
Vivent les pirouettes !
Vive la liberté !

Vous qui sabrez, tambour battant,
Les émeutes civiles,
À nous, bourgeois : vous aimez tant
Les victoires faciles !
Tuer est charmant : d’accord ;
Mais peupler vaut mieux encor.
Aux marchands de lorgnettes
Juillet du moins à profité.
Vivent les pirouettes !
Vive la liberté !

Républicains, ayez de l’or,
Vous aurez des prêtresses ;
Nous nous sentons d’humeur encor
À devenir déesses.
Vos aînés, francs étourdis,
Ont vécu : De profundis.
Aux marchands de lorgnettes
Juillet du moins à profité.
Vivent les pirouettes !
Vive la liberté !
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