Guillaume de Lorris


La Couronne Effeuillée

J' irai, j' irai porter ma couronne effeuillée
Au jardin de mon père où revit toute fleur ;
J' y répandrai longtemps mon âme agenouillée:
Non père a des secrets pour vaincre la douleur.

J' irai, j' irai lui dire, au moins avec mes larmes:
'Regardez, j' ai souffert... ' il me regardera,
Et sous mes jours changés, sous mes pâleurs sans charmes,
Parce qu' il est mon père il me reconnaîtra.

Il dira : ' c' est donc vous, chère âme désolée
La terre manque-t-elle à vos pas égarés ?
Chère âme, je suis Dieu : ne soyez plus troublée ;
Voici votre maison, voici mon coeur, entrez ! '

O clémence ! ô douceur ! ô saint refuge ! ô père !
Votre enfant qui pleurait vous l' avez entendu !
Je vous obtiens déjà puisque je vous espère
Et que vous possédez tout ce que j' ai perdu.

Vous ne rejetez pas la fleur qui n' est plus belle ;
Ce crime de la terre au ciel est pardonné.
Vous ne maudirez pas votre enfant infidèle,
Non d' avoir rien vendu, mais d' avoir tout donné.
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