Gabriel Vicaire


La Vague

Est-ce la nuit ? Non, c’est le jour, un jour livide,
Un jour qui désespéra, empli d’un morne effroi.
Tout est noir. Au lointain s’enfle la mer avide,
Et comme un mur d’horreur, apparu dans le vide,
La vague gigantesque a surgi devant moi.

Elle agite, en hurlant, ses longs cheveux d’écume,
Indomptable cavale au poil toujours fumant ;
Au-dessus de l’eau noire elle oscille un moment ;
Puis, dans le vent terrible et la pluie et la brume,
Sur les sombres récifs s’écrase lourdement.

Une autre la remplace, elle crie, elle approche ;
Fille du même père, elle aura même sort.
Un oiseau se lamente au sommet d’une roche, ;
D’un village voisin arrive un son de cloche ;
Et c’est à la fois triste et doux comme la mort.

Mais un souffle a frémi sur l’océan sublime,
Un prompt rais de soleil l’illumine en passant,
Le visage de l’eau devient presque innocent,
Et je crois voir monter du profond de l’abîme
Ta face radieuse et calme, ô Tout-Puissant.
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