Je songe à cette terre ancienne
Où des couchants longtemps déchus
Dorent des grands cygnes perdus
Pagayant dans une eau paîenne
Au pied des rochers blancs et roux,
Où le souffle est si lent et doux
Qu'il ne seme à la lame oisive
Les frêles fleurs des myrtes verts
Qui poussent pardessus des mers
Du haut de la plage massive.
C'est un pays d'où les vieux dieux
N'ont pas volés vers d'autres cieux;
Où des hélleniques lamies
Nous leurrent au couvert caché;
Où des dryades endormies
Gisent dans l'ombrage taché
D'un soleil d'or par la saulaie;
Où la sirene dans la baie
Du glauque golfe approfondi
Nage indolemment à midi.
Il n'est pas de châsses croulées,
Il n'est pas de lauriers cassés:
On trouve ici les jours passés
Et les nuits longtemps écoulées.
Pour nous, qui viendrons plus tardifs
À ses vallons, à ses massifs,
Ce pays reste impérissable,
Sommeillant chimériquement
Et baigné par l'enchantement
De sa jaune anbe intarissable.